Qu'est-ce qu'une cession ou licence des droits d'auteur?
Une cession ou licence est un contrat par lequel le titulaire des droits d’auteur sur une œuvre transfère une partie ou la totalité de ces droits, gratuitement ou en échange d’une contrepartie financière (redevances ou royalties) à une autre personne.
Très sommairement, la « cession » peut être considérée comme une « vente » ou un « don » des droits d’auteur. Le titulaire transfert « définitivement » tout ou partie de ses droits d’auteur à une autre personne.
La « licence » quant à elle correspond davantage à une « location ». Dans le cadre d’une licence, les droits d’auteur appartiennent toujours au titulaire. Celui-ci autorise simplement une ou plusieurs autres personnes à exercer ses droits d’auteur gratuitement, ou en échange d’une contrepartie financière (redevances ou royalties).
Les contrats de licence prévoient habituellement des limites relativement à la durée[1] et au territoire, ainsi que de diverses conditions d’utilisation de l’œuvre concernée.
Conditions de validité
Pour être juridiquement valides, les cessions et les licences exclusives doivent en principe être consignées par écrit et signées par le titulaire des droits d’auteur. Les tribunaux ont toutefois reconnu la possibilité de « licences implicites » dans certaines circonstances.
Par exemple, dans le cadre de la commande d’un texte par une entreprise, de façon rémunérée, il est probable que l’entreprise utilise ce texte dans le cadre de ses activités. Une clause de licence ou de cession de droits sera habituellement prévue dans les contrats de cette nature. Cependant, en l’absence d’une telle mention, on pourra considérer que, compte tenu des circonstances, l’auteur, en acceptant de créer le texte à la demande de l’entreprise, a implicitement aussi autorisé son utilisation. Cette autorisation serait toutefois limitée aux fins pour lesquelles ledit texte a été commandé.
Un transfert des droits permettant l'exploitation de l'oeuvre
Les contrats de cession et de licence portent uniquement sur les droits qui permettent l’exploitation économique d’une œuvre. Ainsi, il est possible de transférer, entre autres, le droit de reproduire, de diffuser publiquement, d’adapter ou de traduire une œuvre.
Ces droits peuvent être transférés dans leur totalité ou partiellement. Par exemple, un écrivain peut céder l’ensemble des droits sur son manuscrit à une maison d’édition qui pourra alors reproduire, diffuser et traduire le roman ; un peintre peut accorder à une galerie d’art le droit d’exposer publiquement ses toiles mais pas celui de les reproduire.
Ces droits, généralement dans le cadre d’une licence, peuvent également être transférés de manière exclusive ou non exclusive.
Dans le cas d’une licence non exclusive, le titulaire des droits permet au licencié d’exploiter l’œuvre tout en se réservant le droit d’accorder des licences similaires à d’autres personnes, y compris sur le même territoire. Par exemple, un photographe pourrait accorder à plusieurs éditeurs québécois des licences non exclusives pour des utilisations similaires de la même photographie. Inversement, dans un contrat de licence exclusive, l’éditeur qui en bénéficierait serait le seul à pouvoir utiliser la photographie à l’exclusion de tous les autres, voire à l’exclusion du photographe lui-même !
Distinguer les droits économiques des droits moraux
Contrairement aux droits économiques, les droits moraux appartiennent toujours exclusivement à l’auteur de l’œuvre. Ces droits sont dits « incessibles », c’est-à-dire qu’il est impossible pour l’auteur de les transférer à une autre personne. L’auteur peut cependant « renoncer » à les exercer, en totalité ou en partie. Dans ce cas, les droits moraux lui appartiennent toujours, mais il ne se prévaudra pas des recours que lui offre la loi en cas de violation.
Par ailleurs, à la différence des droits économiques, la Loi sur le droit d’auteur ne prévoit pas de règles de forme pour qu’une renonciation aux droits moraux soit valide. Celle-ci peut donc être verbale, implicite ou même tacite. La seule condition est que cette renonciation ait été faite de manière libre, éclairée et non équivoque.
Un transfert de propriété de l'oeuvre n'implique par forcément une «cession» des droits de l'artiste sur l'oeuvre en question
Il est important de souligner que la « propriété » physique d’une œuvre, les droits économiques et les droits moraux sont des notions indépendantes les unes des autres.
Ainsi, le seul fait de vendre la copie physique d’une œuvre, par exemple un tableau, une sculpture ou le manuscrit d’un roman, n’entraîne pas automatiquement une cession des droits économiques sur l’œuvre en question. Il est nécessaire qu’une clause écrite du contrat de vente précise expressément que l’auteur cède ses droits économiques. De même, le seul fait pour un auteur de transférer une partie ou la totalité de ses droits économiques ne signifie pas qu’il renonce automatiquement à ses droits moraux.
Quels sont les avantages et les inconvénients des cessions et licences de droits d'auteur?
Le principal avantage des cessions et licences de droits d’auteur est bien évidemment que ces contrats facilitent l’exploitation des œuvres par des tierces parties, tout en permettant aux artistes de bénéficier des retombées économiques de cette exploitation.
Toutefois, le fait d’accorder des droits à des tiers à travers une cession ou une licence implique nécessairement une certaine « perte de contrôle » des auteurs sur leurs œuvres, dont l’ampleur sera variera selon la nature des ententes signées.
Finalement, les cessions et licences sont des ententes négociées dont le contenu, parfois complexe, dépendra généralement du rapport de force entre le titulaire des droits sur l’œuvre et à la tierce partie qui il entend en confier l’exploitation. Dans ces conditions, il est fortement recommandé de faire appel aux services d’avocats spécialisés pour la rédaction ou la révision de tels contrats.
[1] À noter que dans tous les cas, la durée des droits accordés ne peut dépasser la durée légale de protection des œuvres prévue par la Loi sur le droit d’auteur. Ces droits prennent fin, en général, 70 ans après le décès de l’auteur.