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« Urgence avec un grand U » : l’ordonnance de sauvegarde en matière familiale

Par Chandra Joyram

En situation de séparation ou de divorce, il peut s’écouler plusieurs mois avant la tenue d’une audience finale qui permettra au juge de se prononcer sur le litige. Or, il se peut que des questions urgentes soient soulevées entre temps concernant notamment, le temps parental, l’usage exclusif du domicile ou encore le voyage d’un enfant avec un des parents. Quand ces questions nécessitent une décision plus rapide, il est possible de demander une ordonnance de sauvegarde.

Qu’est-ce qu’une ordonnance de sauvegarde en droit de la famille ?

Dans un contexte de séparation, l’ordonnance de sauvegarde (aussi appelé ordonnance intérimaire) est une décision de la Cour supérieure du Québec. Ce jugement détermine les mesures à prendre immédiatement afin de résoudre une situation urgente alors que les parties n’arrivent pas à s’entendre en attendant la tenue de l’audience finale. Le caractère d’urgence fait en sorte que le tribunal ne fera pas l’étude complète de la situation familiale afin d’y régler de façon définitive. Cela dit, l’ordonnance de sauvegarde n’est pas une mesure définitive, mais plutôt une solution temporaire dont la durée ne peut dépasser plus de six mois, mais qui peut être renouvelée[1].

Qui peut demander une ordonnance de sauvegarde ?

Avec ou sans enfants, les divorcés ou les conjoints en instance de divorce qui ne s’entendent pas sur une question urgente relevant du Code civil du Québec ou de la Loi sur le divorce peuvent demander au juge de décider des mesures d’urgence. Ces personnes peuvent faire une demande en ordonnance de sauvegarde concernant la pension alimentaire pour enfants, l’autorité parentale, les droits de garde et d’accès, leur propriété ou encore l’usage de la résidence familiale entre autres.

D’une autre part, les parents conjoints de faits peuvent aussi faire cette demande par rapport à la pension alimentaire pour enfants, les droits de garde et d’accès, l’autorité parentale ainsi que les biens et dettes relevant du Code civil du Québec[2]. Les parties au conflit peuvent d’ailleurs demander plus d’une ordonnance de sauvegarde et elles peuvent être entendues dans un délai de 10 jours ou moins avec l’autorisation de la Cour[3].

Le critère d’urgence

Puisque l’ordonnance de sauvegarde n’est pas une procédure essentielle, il faut démontrer que la situation en question est urgente et nécessite une intervention immédiate de la Cour pour l’obtenir.

Par exemple, quand il est question du bien-être des enfants et de leur meilleur intérêt, la Cour préfère maintenir l’état des choses en l’absence de circonstances urgentes et exceptionnelles[4]. En effet, quand un changement de garde est demandé au stade de l’ordonnance de sauvegarde, la Cour essaiera d’éviter de modifier une situation existante puisque ce ne sont pas toutes les circonstances du dossier qui seront entendues. Par contre, l’intérêt de l’enfant demeure le critère le plus important.

En effet, la Cour pourrait considérer qu’il y a urgence lorsque l’absence d’intervention pourrait causer préjudice à l’intérêt de l’enfant. Ainsi, quand une demande d’ordonnance de sauvegarde signifie « urgence avec un grand U », la Cour procède à une courte audience rapidement. Le juge fera alors une analyse sommaire des documents déposés par les parties afin de comprendre le contexte de la demande[5].  Selon la situation des parties, certains documents doivent être remis à la Cour supérieure dont leur certificat de mariage, les certificats de naissance de leurs enfants et des déclarations sous serment au soutien d’une demande ou en réponse à la demande de l’autre partie. D’ailleurs, comme la demande est analysée d’après le dossier seulement, remettre une déclaration sous serment est la manière de fournir un témoignage à la Cour. Elle contient toute l’information qu’une partie voudrait communiquer au juge pour lui permettre de prendre une décision éclairée. Il faut donc que cette déclaration soit complète[6].

Et si la question en litige ne satisfait pas au critère d’urgence ?

Pour les divorcés ou les conjoints en instance de divorce, dans le cas où une ordonnance de sauvegarde serait difficile à obtenir en l’absence d’une réelle situation d’urgence, il est possible de recourir à une demande en mesures provisoires. Tout comme l’ordonnance de sauvegarde, la demande en mesures provisoires est applicable temporairement, mais elle peut être prononcée pour une durée de plus de six mois. Les parties peuvent utiliser ce recours afin de planifier des modalités dans leur vie et celle de leurs enfants jusqu’à ce que le jugement final soit prononcé[7].

En résumé, l’ordonnance de sauvegarde permet de résoudre des questions urgentes alors que les parties ne s’entendent pas. Toutefois, cette mesure nécessite des circonstances exceptionnelles dont l’urgence ne laisse pas attendre la tenue de l’audience finale.

Informez-vous auprès d’avocats si une demande en ordonnance de sauvegarde semble être la procédure appropriée pour votre situation.


[1] Barreau de Montréal, « Demander une ordonnance de sauvegarde/« un intérimaire » en matière familiale », Guide d’assistance en droit de la famille, mars 2017, en ligne : https://www.barreaudemontreal.qc.ca/wp-content/uploads/guideassistancedroitfamille_1_fr.pdf, p.5

[2] Idem, p. 9

[3] Idem, p. 3

[4] Michel Tétrault, « De choses et d’autres en droit de la famille » dans Barreau du Québec, Service de la formation continue, Développements récents en droit familial (2023), vol 536, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2023, p. 354

[5] Droit de la famille — 112708, [2011] QCCS 4597 par. 27 à 29

[6] Barreau de Montréal, « Demander une ordonnance de sauvegarde/« un intérimaire » en matière familiale », Guide d’assistance en droit de la famille, mars 2017, en ligne : https://www.barreaudemontreal.qc.ca/wp-content/uploads/guideassistancedroitfamille_1_fr.pdf, p.11, 12

[7] Idem, p. 3

 

 

 

 

 

 


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